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Trois journées à Rennes : « Je redécouvre la fierté d’être journaliste. »

Du 14 au 17 mars, Ouest-Fraternité a accueilli Élyse Ngabire, journaliste burundaise exilée en France, à Ouest-France à Rennes. L’objectif  pour notre consœur ? Voir comment s’organise un journal en France, s’immerger de nouveau dans une rédaction et nouer des liens avec des confrères d’Ouest-France. Un séjour organisé dans le cadre du partenariat développé entre la Maison des Journalistes à Paris et notre association.

Elyse Ngabire devant le siège d'Ouest-France à Rennes.
Élyse Ngabire devant le siège d’Ouest-France à Rennes.

Voici le récit de notre consœur :

Des occasions pareilles n’arrivent pas tous les jours. Depuis mon arrivée en France, le 20 septembre 2015, je ne me suis jamais sentie aussi journaliste que ce jour où j’ai été accueillie au siège d’Ouest-France. Deux ans presque que je n’avais pas participé à une conférence de rédaction. Et cela me manquait beaucoup. Et le mardi 14 mars, une partie de ma soif a été assouvie.

Quand j’arrive, je suis très impressionnée par ce grand bâtiment qui  abrite depuis août 1972, le siège de ce grand quotidien de l’ouest de la France. Je suis accompagnée de Karin Cherloneix, journaliste à Saint-Malo, présidente de l’Ouest-Fraternité. Christelle Guibert, journaliste au service Monde, nous invite à la suivre. Nous traversons le grand hall aménagé en compartiments où chaque service a son propre espace.

À notre arrivée, l’équipe s’apprête à commencer sa première réunion matinale. Tour de table sur l’édition du jour pour voir ensemble le travail abattu la veille : l’autocritique est constructive. Après, c’est la présentation des sujets pour l’édition du soir. Chacun connaît son rôle et les articles ont été minutieusement préparés. On ne perd pas de temps.

Avec les journalistes du service Monde et Karine Cherloneix, présidente d'Ouest-Fraternité.
Avec les journalistes du service Monde et Karine Cherloneix, présidente d’Ouest-Fraternité.

Des journalistes très informés

Devant chaque journaliste du service Monde, une pile d’ouvrages. De temps en temps, un journaliste est sérieusement occupé par la lecture. « Un bon journaliste doit être bien informé, doit lire beaucoup. Nous ne pouvons pas prétendre informer les autres lorsque nous-mêmes, nous ne le sommes pas », conseille toujours Antoine Kaburahe, directeur  des publications au sein du groupe de presse Iwacu pour lequel je travaillais au Burundi et avec lequel je garde des liens professionnels privilégiés.

En fin de matinée, j’assiste à la réunion des chefs de service. On voit ce que chaque service a prévu pour l’édition du lendemain. Après, je visite le service Culture qui assure l’édition du dimanche. Très impressionnant le travail que les journalistes mènent tout au long de la semaine pour alimenter cette édition dominicale.

Sur le plateau rédactionnel, au siège.
Sur le plateau rédactionnel, au siège.

Je visite également le service web. Dans ce service, on sait quels sont les articles les plus lus, ce qui permet d’orienter les journalistes vers les sujets porteurs. « Une fois que l’on est conscient que nous n’écrivons pas pour nous-mêmes, il est très important de travailler en tenant compte du nombre de visiteurs chaque jour ainsi que des sujets qui attirent l’attention des lecteurs pour les fidéliser », explique la responsable.

Au service Culture, j’ai trouvé des journalistes très occupés. Occupés mais compatissants et attentifs aux difficultés que rencontrent les journalistes étrangers qui débarquent en France. Certains me passent leurs cartes de visite et me proposent des piges sur des évènements intéressants à Paris. Le soutien, c’est aussi celui de François-Xavier Lefranc, rédacteur en chef, qui se dit prêt à soutenir cette initiative qui vise, entre autres, la réinsertion professionnelle des journalistes de la Maison des Journalistes.

À la locale de Rennes

À la locale de Rennes, également siège départemental, une dizaine de journalistes occupent le premier étage. Mercredi 15 mars, 10 h, Vincent Jarnigon, chef de rédaction, m’accueille et m’invite à participer à la réunion qu’il anime. Aucune gêne, plutôt un très grand plaisir pour moi de découvrir comment ça se passe ailleurs. J’ai pris ma place le plus naturellement et simplement du monde, comme si j’étais dans ma rédaction au Burundi.

Quelques minutes auprès de l’adjoint multimédia, puis je vais m’entretenir avec Stéphane Vernay, directeur départemental d’Ille-et-Vilaine. Journaliste également, il me raconte l’évolution du quotidien, des origines jusqu’à aujourd’hui. À 15 h, je visite le secrétariat de rédaction. Là, le travail est également impressionnant et sérieux. Des papiers tombent de toutes les locales du département et chaque journaliste s’occupe de la relecture et de la mise en page des articles.

J’ai eu le plaisir de corriger quelques articles des collègues : réduire voire changer les titres pour qu’ils soient informatifs et accrocheurs, revoir les formulations parce que les phrases sont alambiquées et font perdre le sens, etc. Cet exercice me manquait aussi. Ça m’a rappelé la rigueur que j’imposais à mes collègues quand j’étais cheffe d’édition.

Visite nocturne aux rotatives

Le soir, la fabrication du journal.
Le soir, la fabrication du journal.

Le soir, j’ai assisté au travail d’impression des journaux. Des machines très modernes, flambant neuves en remplacement des anciens modèles, tournent sans arrêt. Elles ont été lancées et tournent depuis peu avant notre arrivée sur les lieux. Puis, les premiers exemplaires sont déjà prêts. Des camions attendent dehors. Selon le guide, on privilégie l’impression des éditions des régions les plus éloignées pour éviter les problèmes avec les abonnés.”

 

Notre consœur burundaise au lycée Saint-Vincent de Rennes

Du 14 au 17 mars, à l’occasion du séjour d’Élyse Ngabire, journaliste burundaise exilée en France, à Rennes, une intervention au lycée Saint-Vincent a été organisée, en marge de son immersion à Ouest-France. Une rencontre organisée dans le cadre du partenariat développé entre la Maison des Journalistes à Paris, notre association et le Journal des lycées.

Jeudi 16 mars, les enseignants du lycée Saint-Vincent attendaient cette matinée avec impatience. Élyse Ngabire est d’abord intervenue auprès de toutes les classes de terminale de l’établissement rennais. Environ 150 élèves étaient réunis dans l’amphithéâtre.

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La journaliste leur a raconté son travail comme cheffe du service politique en presse écrite au Burundi. Elle a expliqué comment la situation avait dégénéré avec le président qui voulait rester au pouvoir. Articles à l’appui, elle a montré à ces jeunes ce qu’elle a écrit et ce qui lui a valu des menaces de mort. Elle a raconté comment la situation a empiré au point de l’obliger à partir protégée par des militaires pour fuir le pays. Élyse a raconté son exil, ses enfants qui n’ont pu la rejoindre que onze mois plus tard, sa vie en France aujourd’hui.

Les lycéens et les professeurs sont ressortis impressionnés de cette rencontre.

150 autres élèves attendaient. Les classes de seconde avaient préparé tout un jeu de questions et c’est sous forme d’interview qu’Élyse a, à nouveau, témoigné. Encore beaucoup d’applaudissements, de sourire et de petits mots glissés en sortant par les uns et les autres pour la remercier de son intervention.

Les journalistes en herbe du Journal des lycées l’ont interviewée pour préparer un article dans leur prochain numéro.

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Maison des journalistes : un projet de formation

Le 8 novembre 2016, des membres de l’association ont rencontré, à Paris, des confrères et consœurs résidents de la Maison des journalistes. Les grandes lignes de notre projet de formation ont été définies.

 photo mdj rencontre de novembre

Une dizaine de journalistes de la Maison des journalistes (MDJ) ont participé à cette première rencontre. La plupart sont résidents depuis quelques mois et viennent du Yémen, d’Iran, du Rwanda, du Burundi, de Syrie, de Mauritanie. Quelques-uns n’y sont plus hébergés mais reviennent régulièrement notamment pour collaborer au média en ligne  loeildelexile.org Ils sont journalistes, graphiste, dessinateur, venus de la TV, presse print et en ligne, radio.

Pendant cette rencontre, étaient également présentes Darline Cothière, la directrice et Lisa Viola Rossi, journaliste, chargée des activités pédagogiques et de sensibilisation et secrétaire de rédaction de loeildelexile.org

L’œil de l’exilé, la rédaction bénéficiaire. Nous avons convenu que le média en ligne de la MDJ serait notre point d’accroche. En effet, il est plus concret de partir d’un espace de publication et d’implication existant. Darline Cothière et son équipe réfléchissent à ce que pourrait devenir ce média, surtout que ce dernier vient de recevoir un agrément professionnel de média en ligne. Ce qui implique réorganisation et redéfinition de son objectif et de sa cible.

Les thèmes de formation. Quelques priorités ont été listées.

  • Ainsi, notre premier atelier pourrait être consacré à une présentation du paysage médiatique français. Il semble que nos confrères aient besoin de comprendre comment fonctionnent nos médias tant sur le plan éditorial que commercial, comment se porte la profession, comment ils pourraient collaborer, etc.
  • Le second thème serait un accompagnement à la redéfinition de la ligne éditoriale de l’œil de l’exilé. Les journalistes ont tous une très forte envie d’exercer leur métier. Or, ils sont inconnus en France. Comment valoriser leurs compétences dans nos rédactions, quel genre d’article pourrait intéresser les professionnels français, les lecteurs hors profession, la diaspora ? Comment l’œil peut-il devenir une référence journalistique ? Les aider à trouver ces réponses sera plus concret que des formations académiques sur le journalisme.
  • Enfin, les techniques d’écriture print et web sont attendues.

Référent à la MDJ. Lisa Viola Rossi sera notre référente. La nomination d’un journaliste résident pourrait aussi être précieuse dans ce besoin de relais direct entre eux et nous.

Calendrier. Nous tenterons de caler un premier atelier fin janvier/début février. Le 2 février a été retenu pour l’instant. Le temps pour la MDJ de redéfinir l’organisation de L’œil. Nous avons établi que nos interventions se passeraient sur une demi-journée. Au rythme d’un atelier tous les deux mois, animé par un ou deux formateurs d’Ouest-Fraternité. Serge Poirot et Valérie Parlan se sont portés volontaires pour le premier consacré au paysage médiatique.